04juin 2021

Test express du Aloha 20S

J'ai passé le week-end dernier chez mon beau-frère et ma belle-sœur. Ma nièce de 9 ans a un petit soprano, d'entrée de gamme, qui lui a été offert par un autre de ses tontons. Mon sang de chroniqueur de ukulélés n'a fait qu'un tour quand j'ai vu l'instrument trôner dans sa chambre de petite fille. Ignorant mioches et bambins trottant dans les parages, je me suis jeté sur celui-ci et l'ai examiné, inspecté, gratouillé dans tous les sens, afin d’être à même de me forger un avis rapide mais solide.
Vous trouverez donc dans le billet du jour une chronique 'express' de l'Aloha 20S, réalisée sur la base d'environ trois heures de jeu et manipulations. L'analyse sera donc moins fouillée qu'à l'ordinaire, mais tentera de vous apporter un premier ressenti et quelques indices étayés sur l'intérêt qui faudrait porter (ou non) à ce ukulélé très peu onéreux.

Aloha 20S en entier, juin 2021

Spécifications

- Table, fond et éclisses en Sapele laminé
- Manche en Sapele
- Touche en palissandre
- Diapason de 13.5 pouces (34.3 cm)
- Mécaniques à écrou, ouvertes, avec boutons couleur crème
- 12 frettes 
- Chevalet en palissandre avec sillet plastique
- Finition satinée
- Cordes en nylon clair

Conception, esthétique

L'Aloha 20S présente vraiment bien et ne paraît absolument pas ‘cheap’, malgré son prix fort modeste (environ 45€ dans les boutiques compétitives). Son joli corps aux teintes caramel fait belle impression. Celui-ci est présenté par la marque comme étant en Sapele. Ce bois est aussi parfois appelé acajou africain (plus vraisemblablement 'confondu avec', mais je ne suis ni botaniste ni luthier et ne saurais m'étendre sur le sujet). Il offre des propriétés sonores assez voisines de l'acajou, souvent toutefois un peu plus claires, brillantes et moins typées que celui-ci. Bien sûr, vu le tarif affiché par l'instrument, nous parlons ici de bois laminé. L'homogénéité dans le choix du bois semble intéressante pour le timbre général, en revanche, le choix du contreplaqué l’est beaucoup moins.
La table est agrémentée d'une rosace élégante (décalcomanie jolie, mais probablement fragile car elle ne semble pas vernie) et se pare d'un chevalet type tie-bar, en palissandre, équipé d'un sillet en plastique. Deux ronds en perloïd masquent certainement des petites vis de maintien, cheap mais pas moche. Les jointures entre table, éclisses et dos sont discrètes et bien réalisées. Le vernis satiné qui a été appliqué sur l'intégralité de la caisse est très agréable, tant visuellement qu'au toucher.

Corps du Aloha 20S, juin 2021
Le manche qui prolonge l'ensemble est également en Sapele, mais d'une teinte plus claire qui dénote un peu si on regarde l'instrument de dos. Il est vraisemblablement composé de deux pièces, dont la jonction au niveau du talon est discrète. Il se dote d'une touche en palissandre équipée de 12 frettes très fines et de seulement 3 chiches repères. Aucun point ne vient étoffer la face latérale, ce qui est dommage pour un instrument vraisemblablement destiné à des débutants. Au-dessus du sillet en plastique trône une tête au design assez classique, à la teinte un brin plus sombre que le corps. Elle arbore un joyeux et fleuri logo Aloha, sentant bon les îles du Pacifique.
C'est très mignon, mais après deux secondes de songes vanillés, je ne peux m'empêcher de penser qu'on me prend un peu pour un âne. Le petit ukulélé, 100% 'made in China', n'a jamais vu une vahiné.
Les mécaniques ouvertes, mises en place ici, semblent d'une qualité décente. Leur couleur crème s'harmonise assez bien avec la décalcomanie voisine. Dommage que l'on distingue en transparence l'axe de fixation, je trouve cela assez disgracieux.
Au niveau de la jonction avec le corps, je note deux éléments que j'ai bien appréciés : le manche se finit en une élégante pointe et la dernière frette est exactement alignée avec la limite supérieure de la table. C'est en accumulant ce type de détails réussis que l'on parvient à créer un rendu d'ensemble très agréable à l'œil.

Vues du Aloha 20S, juin 2021

Finitions, cordes et réglages

Le niveau de finition de ce petit ukulélé est vraiment décent, surtout si l’on considère son prix faible et son origine modeste. J’ai assez peu de griefs à partager. Seules les frettes pourraient être un petit peu mieux poncées sur les tranches, mais j'ai déjà vu vraiment pire sur des instruments quatre fois plus chers. J'aimerai également que la touche rapportée soit légèrement plus fine au niveau du corps.

Les cordes fournies à l'origine, en nylon clair, ne sont pas transcendantes mais permettent tout de même de jouer. On est loin des spaghettis que l’on peut rencontrer parfois. La prochaine fois que je verrai ma nièce, je les lui remplacerai pour des Aquila, qui apporteront sans doute un son un peu plus généreux, expressif. La hauteur des cordes est tout à fait correcte. L'intonation m'a semblée un peu discutable quand on atteint le haut de manche, dans les notes aiguës... Ce serait à confirmer avec un jeu neuf. Le réglage avec les mécaniques est assez efficace et l'accordage tient ensuite très correctement.

L'instrument n'est pas parfaitement équilibré. En le tenant en son centre, je constate qu'il a tendance à basculer, aussi bien vers la tête que vers l'arrière. Toutefois, quand le ukulélé est porté en position classique, tant assis que debout, ce petit défaut ne se fait pas ressentir.

Confort de jeu et qualité sonore

Comme évoqué préalablement, malgré le fait qu'il ne soit pas parfaitement équilibré, l'Aloha 20S est assez agréable à porter et jouer. Son design classique est sans vraie fausse note. Il nous permet alors d'essayer d'en produire le minimum (de fausses notes), surtout si l'on se cantonne à jouer dans le bas du manche. Ce dernier est d’ailleurs assez confortable, il m'a paru un peu plus plat et fin que ce que l'on retrouve chez Kala. Je me suis surpris à gratouiller le petit uke pendant plusieurs heures, sans ronchonner sur autre chose que cette touche un peu épaisse à mon goût. J'ai en effet parfois été un peu gêné, mon doigt accrochant (en de rares occasions) le rebord de celle-ci. Un coup à prendre certainement.

Côté son, l'animal ne se montre ni surprenant, ni indigne. Les sonorités produites illustrent une certaine brillance, des mediums et aigus assez présents. Elles sont toutefois assez limitées, pourvoyant peu d'harmoniques, de richesse et de rondeur. Comme sur beaucoup de ukulélés d'entrée de gamme en laminé, le son n'a ni grande personnalité, ni vraie coloration. Sustain et projection sont moyens mais non ridicules. Les 'chunks' sonnent un peu plat, ils manquent de relief, conviction.

Ici, ma description ne fera pas rêver les musicophiles, mais sur le fond, j'ai été agréablement surpris de bien m'amuser sur ce petit instrument. Je m'attendais à un manipuler jouet quasiment injouable, comme beaucoup de produits à ces tarifs, mais j'ai pu sortir de celui-ci tout ce que je voulais. N'importe quel morceau assez simple, qui n'exige pas de parcourir tout le manche, impliquant les accords de bases dans les premières positions, sera aisément reproductible et pourra se montrer plaisant à l'oreille. Mention spéciale pour les rythmiques strummées, un peu punchy, qui peuvent même sonner de manière sympathique.

Cet Aloha 20S est à cent lieues d'un 'K' hawaïen en Koa, mais c'est un premier petit pas dans le ukulélé, il sonne comme tel et n'a pas à en rougir.

Equipement complémentaire

L'Aloha est fourni avec une housse minimaliste, en nylon, permettant le transport mais ne protégeant quasiment pas l’instrument (tout juste des rayures). C'est toujours un petit plus qu'il faut saluer, mais l'on reste dans le domaine du 'mieux que rien'.

Housse du Aloha 20S, juin 2021

Conclusion

L’Aloha 20S est un ukulélé soprano qui pourra tout à fait être un premier tremplin, une rencontre agréable et motivante, pour tout débutant.
Il ne pénalisera pas le joueur novice, ni par son ergonomie, assez réussie, ni par son timbre, modeste mais acceptable.

Le conseillerais-je à un ami voulant se mettre au uke ? Ou pour l'offrir à son enfant ?
Si mon camarade ne veut investir que le minimum absolu pour débuter, oui. A moins de 50 euros, cet Aloha 20S parvient à réaliser l'exploit d'être un vrai instrument de musique. En comparaison, certains produits concurrents, pouvant être commandés sur 'Ah ma zone' pour quelques euros de moins, seront bien souvent des joujoux inaccordables, à l'intonation farfelue.

D'autres modèles intéressants dans cette gamme de prix ?
Je n'ai pas manipulé de ukulélés premier prix depuis quelques temps, mais j'ai pour objectif d'en chroniquer d'autres, à l'occasion. Me viennent en tête quelques références, qui ont réputation de satisfaire, la plupart du temps, enfants ou grands débutants : Ortega RU5, Flight Travel, Makala Dolphin, Kala Waterman, Enya Nova U Mini, etc.

Nota:
Comme toujours, les éléments partagés dans ce billet ne représentent que mon avis subjectif, forgé d'ailleurs rapidement car je n'ai disposé de l'instrument que pendant quelques heures. J'invite aussi toute personne à essayer l'Aloha 20S pour se forger sa propre opinion sur celui-ci. N'hésitez pas à nous partager votre retour en commentaire.